22 octobre 2014

ACTU : Le débat sur les armes nucléaires s’achève à l'Assemblée générale sur les habituelles dissensions entre États dotés et non dotés

Jean-Marie COLLIN

La Première Commission de l’Assemblée générale de l’ONU chargée du désarmement et de la sécurité internationale a terminé le 21 octobre son débat thématique sur les armes nucléaires. Comme lors des précédentes séances, tous les États non dotés ont déploré le manque de progrès dans le désarmement nucléaire, rappelant l’équilibre indispensable entre les trois piliers du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) de 1968 : désarmement, non-prolifération et droit à l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire. 

Rappelant que la seule garantie d’éviter une explosion nucléaire volontaire ou accidentelle était l’élimination totale des armes nucléaires, l’Egypte, au nom du Groupe des États arabes, ainsi que le Maroc, l’Équateur et la République populaire démocratique de Corée ont estimé que la priorité était l’élaboration d’une convention d’interdiction des armes nucléaires. « Les armes nucléaires sont les seules à ne pas faire l’objet d’une norme universelle d’interdiction », a rappelé le Maroc, tandis que l’Égypte saluait la déclaration de l’Australie, qui a exprimé les préoccupations d’un large groupe d’États face aux conséquences humanitaires des armes nucléaires et leur soutien à l’organisation des premières conférences internationales sur ce sujet depuis un an. 

Dans son intervention, l’Australie s’est également inquiétée de l’existence de quelque 16 000 têtes nucléaires, appelant à la levée de l’état d’alerte de ces systèmes et à la suppression de la dissuasion nucléaire dans les doctrines militaires des États dotés. Dans le même ordre d’idées, l’Irlande et la Slovénie ont introduit le projet de résolution intitulé « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire » (L.21), par lequel elles rappellent l’urgence de progresser dans les négociations multilatérales sur le désarmement. De son côté Palaos, qui a rappelé que la région Pacifique avait connu près de 300 essais nucléaires effectués par les États-Unis et la France, a réaffirmé son soutien à la plainte déposée par les Îles Marshall devant la Cour internationale de Justice et appelé au lancement de négociations pour l’élimination de ces armes « même si les Puissances nucléaires n’y sont pas impliquées » et « hors de la Conférence du désarmement » si ce mécanisme est paralysé.

Rejetant les accusations des États non dotés, la Fédération de Russie a rappelé qu’elle avait réduit son arsenal nucléaire de près de 90% dans le cadre des accords START 1 et 2 conclus avec les États-Unis. Soulignant l’importance de la confiance entre les États dotés pour engranger de nouveaux progrès, son représentant a déploré le déploiement unilatéral de missiles par les États-Unis, le refus de certains États de démilitariser l’espace extra-atmosphérique et la persistance du principe de frappes stratégiques. Mis en cause directement par la Finlande, qui lui a reproché d’avoir bafoué le Mémorandum de Budapest de 1994 en violant l’intégrité territoriale de l’Ukraine et en annexant la Crimée, la Fédération de Russie a par ailleurs usé de son droit de réponse pour rejeter ces accusations. Son représentant a indiqué que le Mémorandum de Budapest était un engagement à ne pas employer ou menacer d’employer d’armes nucléaires et que dans le cas de l’Ukraine, « ces obligations n’ont pas été violées ». Quant à l’annexion de la Crimée, le représentant a indiqué que c’était « le résultat d’un référendum » organisé « sous le contrôle d’observateurs internationaux » qui a vu « une écrasante majorité de la population choisir le rattachement à la Russie ». 

Dans leurs interventions, les délégations sont aussi largement revenues sur les efforts déployés dans le domaine de la non-prolifération. La Tanzanie et l’Équateur, appartenant aux zones exemptes d'armes nucléaires (ZEAN) d’Afrique et d’Amérique Latine, ont souligné le rôle essentiel d’instruments de non-prolifération de celles-ci et l’importance de l’adhésion des Puissances nucléaires aux protocoles des Traités de Tlatelolco et Pelindaba qui prévoient des garanties de sécurité négative aux États qui en font partie. Ces deux pays, avec l’Égypte, au nom du Groupe des États arabes, l’Algérie, Bahreïn, la Turquie et la République arabe syrienne ont par ailleurs déploré qu’une telle zone n’ait pas encore été établie au Moyen-Orient, conformément au Plan d’action adopté en 2010, à l’issue de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. 

L’Égypte et la République arabe syrienne ont directement mis en cause Israël, la première regrettant qu’il « s’obstine à refuser d’adhérer au TNP et à placer ses installations nucléaires sous le contrôle de l’AIEA », la seconde dénonçant « la protection dont jouit Israël » et « la politique de deux poids deux mesures qui s’applique à la région ». « L’approche d’Israël a toujours été pragmatique », a répondu sa représentante dans son intervention, soulignant que « les violations les plus flagrantes du TNP » avaient été « le fait de pays du Moyen-Orient ». Et la représentante de défendre « le principe de réalité » et  « les spécificités de la région » avant de plaider pour l’instauration d’un « climat de coopération », avec en premier lieu, l’adoption « de mesures pour renforcer la confiance entre les États de la région ». Soutenant aussi l’instauration d’une telle zone, l’Espagne et la Slovénie ont salué les efforts du facilitateur finlandais pour parvenir à l’organisation de la conférence internationale sur ce sujet initialement prévue en 2012. 

Une autre menace au régime international de non-prolifération dénoncée lors de cette séance a été celle constituée par les programmes nucléaire et balistique de la République populaire démocratique de Corée (RPDC). La Finlande et l’Espagne ont déploré « le défi » qu’ils constituent pour la communauté internationale, appelant la RPDC à « renoncer à ses ambitions ».

Rejetant ces accusations, la RPDC s’est dite contrainte de développer un tel programme, en raison de la menace exercée par les États-Unis. Son représentant a dénoncé à la fois « le chantage nucléaire constant », les « exercices nucléaires annuels », la modernisation des arsenaux, « la présence d’ogives nucléaires sur les territoires d’autres États » et le maintien de la dissuasion nucléaire dans les doctrines militaires des Puissances nucléaires. 


Source : ONU

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