Le 19 janvier, le Conseil de sécurité a demandé au Président sortant de la Gambie, M. Yahya Jammeh, de mener «un processus de transition pacifique et ordonné» et de transférer le pouvoir au Président élu, M. Adama Barrow, au plus tard le 19 janvier 2017, «conformément à la Constitution gambienne».
En adoptant à l’unanimité de ses membres la Résolution 2337 (2017), le Conseil de sécurité a également demandé aux Forces de sécurité gambiennes de faire preuve de la plus grande retenue afin de maintenir le calme dans le pays. Celles-ci ont «le devoir et l’obligation de se mettre à la disposition des autorités démocratiquement élues», a-t-il souligné.
Le Président Jammeh a rejeté le 9 décembre, après les avoir acceptés dans un premier temps, les résultats officiels de l’élection tenue le 1er décembre 2016 proclamant M. Barrow futur Président de la Gambie. Le Conseil a exhorté, en conséquence, tous les acteurs gambiens à respecter «les résultats du scrutin» qui ont fait de M. Barrow «le dépositaire de la volonté librement exprimée du peuple gambien».
Avant l’adoption de la Résolution 2337 (2017), le délégué du Sénégal, pays qui présentait le texte, a salué l’entrée en fonctions de M. Barrow en tant que Président de la Gambie, après sa prestation de serment, plus tôt dans la journée, à l’ambassade de Gambie à Dakar. «Aujourd’hui, M. Barrow est le Président légitime de la Gambie», a réaffirmé le représentant de la France.
Par cette résolution, le Conseil de sécurité demande également aux pays de la région de coopérer avec le Président Barrow et fait siennes les décisions de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Union africaine reconnaissant M. Barrow en tant que Président. L’engagement de la CEDEAO de garantir, «en privilégiant les moyens politiques», le respect de la volonté du peuple gambien a le soutien sans réserve du Conseil.
Soulignant l’importance de veiller à la sécurité du futur Président et de tous les citoyens gambiens, le Conseil prend, en outre, acte de la décision prise à ce sujet par la CEDEAO. Enfin, il prie le Secrétaire général de faciliter l’instauration d’un dialogue politique entre les parties gambiennes dans le respect des résultats de l’élection présidentielle.
Certaines délégations, dont l’Ukraine, l’Uruguay et la Bolivie, ont tenu à préciser, en expliquant leur vote, que rien dans ce texte ne pouvait être interprété comme autorisant le recours à la force. «Celui-ci ne pourrait être autorisé que par une résolution du Conseil», a rappelé le représentant de la Bolivie. «Cette résolution ne veut pas dire, à ce stade, que le Conseil autorise des mesures militaires», a renchéri son homologue de l’Ukraine.
Faisant remarquer que la situation se dégradait dans le pays, le délégué de l’Éthiopie a, lui, souligné l’importance d’entreprendre tous les efforts possibles pour que le pays ne sombre pas dans le chaos. «La crise politique en Gambie a des conséquences importantes pour la stabilité dans la région», a-t-il prévenu, en exhortant le Conseil à préserver son unité.
Enfin, contrairement à certaines délégations, telles que la Fédération de Russie, qui ont loué la souplesse de la délégation porte-plume lors du processus de négociation, le délégué de l’Uruguay a déclaré qu’il aurait souhaité que ce processus soit plus inclusif.
Le projet de résolution a été présenté le 17 janvier au soir, «ce qui n’a pas permis aux membres du Conseil de l’examiner de manière approfondie et de formuler des commentaires, ni de tenir, au préalable, des consultations», a-t-il regretté, appuyé par son homologue de la Bolivie.
RESOLUTION 2337 (2017) du 19
janvier 2017
CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE DE L’OUEST
Le Conseil de sécurité,
Réaffirmant son ferme attachement au respect de la
souveraineté, de l’indépendance, de l’intégrité territoriale et de l’unité de
la République islamique de Gambie et rappelant l’importance des principes de
bon voisinage, de non-ingérence et de coopération régionale,
Rappelant la déclaration de son Président en date
du 21 décembre 2016 sur la consolidation de la paix en Afrique de l’Ouest
et la déclaration à la presse de ses membres en date du 10 décembre 2016 sur
les élections tenues en Gambie,
Rappelant les dispositions pertinentes de
l’article 23 4) de la Charte africaine de la démocratie, des
élections et de la gouvernance et celles du Protocole additionnel de la
Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur la
démocratie et la bonne gouvernance,
Félicitant le peuple gambien d’avoir tenu une
élection présidentielle pacifique et transparente le 1er décembre 2016,
Prenant note des résultats officiels des élections
tenues le 1er décembre 2016, publiés par la Commission électorale
indépendante gambienne, selon lesquels M. Adama Barrow a été proclamé
Président, résultats que l’ancien Président, Yahya Jammeh, a lui-même
publiquement reconnus et acceptés le 2 décembre,
Condamnant fermement la déclaration faite par l’ancien
Président Jammeh le 9 décembre, par laquelle il a rejeté les résultats
officiels de l’élection du 1er décembre, la prise de contrôle de la
Commission électorale indépendante par les Forces armées gambiennes le 13
décembre 2016, ainsi que la tentative faite par le Parlement le 18 janvier
2017 de proroger le mandat du Président Jammeh pour une période de trois mois,
Condamnant dans les termes les plus énergiques les
tentatives faites pour usurper la volonté du peuple et remettre en cause
l’intégrité des opérations électorales en Gambie,
Condamnant la tentative qui a été faite d’empêcher
un transfert pacifique et ordonné du pouvoir au Président Barrow en déclarant
l’état d’exception,
Se déclarant
gravement préoccupé par
le risque que la situation en Gambie se détériore, rappelant que le
Gouvernement gambien est responsable au premier chef de la défense des droits
de l’homme et de la protection de la population civile en Gambie et exigeant de
toutes les parties prenantes qu’elles fassent preuve de la plus grande retenue,
s’abstiennent de tout acte de violence et restent calmes,
Se félicitant de la déclaration faite par le Conseil
de paix et de sécurité à sa 647e réunion, le 13 janvier 2017, selon
laquelle à compter du 19 janvier 2017, l’Union africaine cesserait de
reconnaître le Président sortant, Yahya Jammeh, comme le Président légitime de
la République de Gambie,
Prenant note du communiqué publié par le Président
de l’Union africaine le 10 décembre 2016 et du communiqué conjoint publié par
la Commission de la CEDEAO, la Commission de l’Union africaine et le Bureau des
Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) le
10 décembre 2016,
Se félicitant des initiatives prises par la CEDEAO,
notamment de la visite effectuée à Banjul le 13 décembre 2016 par une
délégation de haut niveau CEDEAO-ONU sous la conduite de S. E. Mme
Ellen Johnson Sirleaf, Présidente de la République du Libéria et Présidente de
la Conférence des chefs d’État et de gouvernement, visite qui avait pour objet
d’assurer une transition pacifique et ordonnée en Gambie, ainsi que de la
visite effectuée à Banjul le 13 janvier 2017 par une délégation de haut niveau
de la CEDEAO,
Se félicitant
également des
efforts faits par S. E. M. Muhammadu Buhari, Président et
commandant en chef des Forces armées de la République fédérale du Nigéria, en
sa qualité de médiateur de la CEDEAO en Gambie, et par
S. E. M. John Dramani Mahama, ancien Président de la République
du Ghana, en tant que Coprésident,
Reconnaissant l’importance du rôle de médiation joué
par M. Mohammed Ibn Chambas, Représentant spécial du Secrétaire général et
Chef de l’UNOWAS,
Saluant et appuyant
vigoureusement les
efforts que continuent de déployer l’Union africaine et la CEDEAO pour
promouvoir la paix, la stabilité et la bonne gouvernance dans la région,
1. Exhorte toutes les parties et tous les acteurs
gambiens à respecter la volonté du peuple et les résultats du scrutin par
lequel Adama Barrow a été reconnu futur Président de la Gambie et dépositaire
de la volonté librement exprimée du peuple gambien, ainsi que l’a proclamé la
Commission électorale indépendante;
2. Fait
siennes les décisions
de la CEDEAO et de l’Union africaine de reconnaître M. Adama Barrow en
tant que Président de la Gambie;
3. Demande aux pays de la région et à
l’organisation régionale de coopérer avec le Président Barrow dans ses efforts
en vue de procéder au transfert des pouvoirs;
4. Se
félicite des
décisions sur la Gambie prises à la cinquantième session ordinaire de la
Conférence des chefs d’État et de gouvernement, qui s’est tenue à Abuja le
17 décembre 2016, et des décisions prises par le Conseil de paix et de
sécurité à ses 644e et 647e réunions, tenues respectivement les
12 décembre 2016 et 13 janvier 2017;
5. Se
félicite également des
décisions par lesquelles le Conseil de paix et de sécurité a affirmé le
caractère inviolable des résultats de l’élection présidentielle tenue le 1er
décembre 2016 en Gambie; engagé l’ancien Président, Yahya Jammeh, à s’en tenir
à la lettre et à l’esprit du discours qu’il a prononcé le 2 décembre 2016, dans
lequel il a déclaré se réjouir que la démocratie soit bien établie en Gambie et
a félicité le Président, Adama Barrow, et annoncé que, à compter du
19 janvier 2017, il cesserait de reconnaître le Président sortant Yahya
Jammeh comme Président légitime de la République de Gambie;
6. Exprime son soutien sans réserve à la CEDEAO
dans l’engagement qu’elle a pris de garantir, en privilégiant les moyens
politiques, le respect de la volonté du peuple gambien, telle qu’elle ressort
des résultats de l’élection du 1er décembre;
7. Demande à l’ancien Président, Yahya Jammeh, de
mener un processus de transition pacifique et ordonné, et de transférer le
pouvoir au Président, Adama Barrow, au plus tard le 19 janvier 2017,
conformément à la Constitution gambienne;
8. Souligne qu’il importe de veiller à ce que la
sécurité du Président, Adama Barrow, ainsi que celle de tous les citoyens
gambiens, soit pleinement assurée, et prend acte de la décision prise par la
CEDEAO à ce sujet à sa cinquantième session;
9. Demande à toutes les parties prenantes, à
l’intérieur et à l’extérieur de la Gambie, de faire preuve de retenue, de
respecter l’état de droit et d’assurer une transition pacifique du pouvoir;
10. Demande
également aux forces
de défense et de sécurité gambiennes de faire preuve de la plus grande retenue
afin de maintenir le calme dans le pays et souligne qu’elles ont le devoir et
l’obligation de se mettre à la disposition des autorités démocratiquement
élues;
11. Prie le Secrétaire général de le tenir
informé de l’application de la présente résolution dans les dix (10) jours
suivant son adoption;
12. Prie le Secrétaire général de faciliter
selon qu’il convient, notamment par l’intermédiaire de son Représentant
spécial, l’instauration d’un dialogue politique entre les parties prenantes
gambiennes, en vue d’assurer la paix en Gambie, dans le respect des résultats
de l’élection présidentielle reconnus par la CEDEAO et l’Union africaine, et de
fournir une assistance technique à la médiation de la CEDEAO en tant que de
besoin;
13. Décide de rester saisi de la question.
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire